Synopsis
Après la mort de leur fils dans un accident de voiture, Anne et Paul Sacchetti décident d’emménager à la campagne, en Nouvelle-Angleterre, afin de faire le deuil de ce tragique événement. Une fois installés dans leur nouvelle maison, Anne est persuadée que l’esprit de son fils tente de communiquer avec elle. Elle fait appel à une de ses amies ultra-sensible, qui perçoit des vibrations funestes dans toute la maison. La demeure a en effet été le théâtre d’un drame sanglant qui a profondément marqué et hanté les lieux…
Critique
Difficile de comprendre l’ambition artistique qui se cache derrière ce modeste direct-to-dvd, We are still Here. En apparence, un film de possession des plus classiques qui reprend tous les poncifs du genre. Un couple emménage dans une région reculée, dans un bled peu accueillant, mais qui offre l’avantage de dépayser totalement notre couple urbain. Bien entendu, il s’est déroulé un drame sanglant dans cette demeure il y a déjà bien longtemps et les phénomènes surnaturels commencent à se produire très rapidement. Des trucs bien flippants du genre le cadre de photo qui se décroche tout seul du mur. De quoi mourir d’une crise cardiaque. Anne Sacchetti, dont le nom aurait pu être utilisé dans une fresque mafieuse scorsesienne, ne parvient pas à faire le deuil de la mort de son fils et verra dans tous ces phénomènes des tentatives de communication de son esprit. Pauvre Anne, si elle savait… (elle va finir par le savoir, ne vous inquiétez pas). Comme d’habitude, c’est la femme (ou souvent l’enfant) qui est le premier personnage à sentir ces phénomènes (vous savez, ce fameux mythe misogyne, la “sensibilité féminine”). Anne décide donc d’inviter pour le week-end une amie médium pour tirer tout ça au clair et confirmer ses intuitions. Un couple de Hippies débarque, spécialisé dans les phénomènes paranormaux. Visiblement, l’usage prolongé et intensif du cannabis et autres psychotropes a exacerbé l’acuité sensorielle de nos deux tourtereaux stone. Le couple fera comprendre à notre crédule Anne qu’en réalité, il ne s’agit pas de son fils, mais plutôt d’une horde d’esprits malveillants qui hantent les lieux. Jusqu’ici, le spectateur n’est pas déboussolé et pourrait même s’essayer à écrire la suite tant le déroulé de l’histoire suit sans broncher la mécanique ultra-huilée du blockbuster de genre. Mais tout à coup, les fantômes, qui jusqu’ici se contentaient d’apparition fugaces, se lancent dans un carnage gore. Bras qui transpercent les corps des victimes, écrabouillement de tête à mains nues… Bref, des fantômes enragés en mode Ken le Survivant.
C’est ce basculement et cette rupture de ton qui constituent LA seule originalité du film. Nos confrères américains ont d’ailleurs visiblement été emballés par ce déchaînement de passions sanglantes, allant jusqu’à invoquer les influences de Lucio Fulci. De notre côté, on se dira juste que le pauvre Lucio doit être en train de gratter sa tombe pour en sortir et venir se farcir notre jeune réalisateur, Ted Geoghegan… Il est vrai qu’un tel changement de ton aurait pu donner lieu à une parodie grotesque et jubilatoire. Mais n’est pas Takashi Miike ou Robert Rodriguez qui veut… Ce parti-pris ne fait que révéler les faiblesses techniques et artistiques du film. Tant que les fantômes n’apparaissaient que brièvement, les effets spéciaux étaient plutôt réussis. Les corps calcinés et incandescents des spectres détonnaient d’ailleurs par rapport au montage et au mixage désastreux. Mais par la suite, les plans larges et fixes des fantômes laissent apparaître les artifices et ruinent toute l’atmosphère mystérieuse qui constituaient jusque-là l’un des rares attraits du film. Ne parlons même pas du scénario, qui sombre dans le granguignolesque et l’absurde. Les Sacchetti sont envahis par toute la ville qui ne comprend toujours pas pourquoi ce couple récemment installé n’a pas encore été victime de la malédiction des lieux. Scénaristiquement, cette invasion n’a pour seule justification qu’un bain de sang final durant lequel les Sacchetti sont éperdus et évincés (euhhh…chéri, file moi ton scénar, on est censé faire quoi à ce moment-là?) Malheureusement, Ted Geoghegan n’a pas les moyens de ses ambitions et les rares bonnes idées qui parsèment le film, comme le personnage happé par des escaliers mouvants, se perdent dans une réalisation amateure et cheap.
We are still here rejoint au final cette longue liste de films qui affichent une ambition intéressante mais sont incapables de la mener à bien. Seuls quelques réalisateurs confirmés parviennent à bousculer les codes tout en offrant un spectacle jouissif et novateur (notre cher Takashi, même si parfois il s’emballe un peu trop dans sa boulimie artistique). C’est surtout l’amateurisme technique qui pourrait choquer le spectateur pointilleux. le montage manque de fluidité et le mixage devrait heurter la sensiblité acoustique de tout ingénieur du son qui se respecte. Même un faible budget ne saurait justifier de telles erreurs techniques. C’est sévère, mais c’est pour le bien du cinéma de genre.
Une seule conclusion s’impose : passez votre chemin et si jamais vous êtes victime d’une soif inextinguible d’épouvante, optez pour de bons vieux classiques. Mieux vaut se mater 10 fois un bon film qu’une fois un mauvais film (oui, je suis faiseur de maximes à mes heures perdues…)
PS : on a pas parlé des acteurs. Ils sont…euh…à l’image du reste du film….
22
10
NOTE
Informations
We Are Still Here
Titre original : We Are Still Here
Réalisation : Ted Geoghegan
Scénario : Ted Geoghegan, Richard Griffin
Casting : Barbara Crampton, Andrew Sensenig, Lisa Marie…
Pays d’origine : Etats-Unis
Genre : Film de fantôme
Durée : 84 minutes
Date de sortie : 21 septembre 2016 (VOD)