Synopsis :
Finn, Callie et Jasper, trois colocataires vivant dans un quartier résidentiel, découvrent le cadavre de leur voisin scientifique. En inspectant sa maison, ils tombent sur un gigantesque appareil photo qui prend des clichés de leur salon tous les jours à heure fixe. Ils se rendent rapidement compte que les événements dévoilés n’ont pas encore eu lieu et que la machine est capable de photographier les événements futurs 24 heures à l’avance. Ils décident chacun de profiter de cette opportunité pour améliorer leur quotidien. Mais les soupçons d’un bookmaker, intrigué à l’égard des paris toujours gagnants de Jasper, vont menacer le groupe et créer des tensions entre les trois colocataires.
Critique :
Nombre de films de science-fiction traitant de la thématique du temps (répétition d’un même événement, voyage dans le temps…) mettent généralement en scène des personnages tentant d’agir pour infléchir les événements futurs. Dans Time Lapse, l’intention première des protagonistes est inverse : si nos trois colocataires profitent de la machine pour améliorer leur existence (notamment en engrangeant un pactole grâce aux paris sportifs), ils sont toutefois persuadés que chaque photo doit être scrupuleusement respectée sous peine de voir leur existence réduite à néant, comme celle de leur voisin, qui, semble-t-il, a voulu échapper à son funeste destin. « We don’t fuck with time » répètera inlassablement Jasper comme un commandement intangible. Nos colocataires reproduisent donc avec minutie tous les éléments et la composition de la photo de la veille, quels que soient les événements dépeints.
Finn est un artiste peintre qui souffre d’un manque d’inspiration et reste plusieurs heures devant sa toile vierge. Il vit avec sa copine, Callie, figure maternelle, et son ami Jasper, serial branleur qui passe son temps à jouer à la console et à dilapider son argent en paris. La découverte de la machine de leur voisin va leur permettre à tous trois de résoudre et surmonter leurs difficultés quotidiennes. Grâce aux résultats des courses connus d’avance, Jasper se retrouve très rapidement avec un pactole conséquent, qu’il partage avec ses deux colocataires. Finn, de son côté, découvre sur chaque photo sa toile du lendemain, ce qui lui évite toute panne d’inspiration et lui permet de s’atteler à la tâche avec facilité. Callie, quant à elle, profite du confort matériel apporté par les paris pour se consacrer à l’écriture. Bref, tout semble aller pour le mieux dans le meilleur des mondes possibles pour nos trois amis, quand le bookmaker de Jasper va faire irruption et découvrir leur secret. L’arrivée du bookmaker amorce un engrenage qui va faire dérailler l’existence bien huilée de nos protagonistes. Cet événement charnière génère des tensions entre les trois colocataires, dont les intérêts vont finir par se heurter. Jasper est obnubilé par l’argent et le souci de respecter la causalité temporelle, tandis que Finn, las du danger que représente la machine, exprime son souhait de mettre un terme à l’expérience. Mais la machine elle-même va être source de tension à travers les photos dévoilées et instaurer un triangle amoureux où la méfiance va prendre le pas sur l’amitié et la coopération.
Time Lapse est un thriller au rythme soutenu, fortement imprégné de l’univers d’Hitchcock. La parenté avec Fenêtre sur cour est clairement assumée, à la différence près que les personnages s’épient eux-mêmes et décident d’intervenir dans le déroulement de leur propre existence. Si chacun semble initialement tirer profit des bénéfices apportés par la machine, leurs intérêts vont finir diverger, engendrant des conflits ouverts. Car Time Lapse est certes un thriller faisant intervenir des éléments extérieurs qui vont bouleverser la vie des protagonistes (la machine, le bookmaker…), mais il met surtout en scène un triangle amoureux qui va finir par se déchirer. Le film exploite à cet effet la métaphore de la spirale que l’on retrouve dès le premier plan du film, qui s’ouvre sur une tournoyante peinture rouge. Un prélude au destin sanglant et tragique qui attend nos personnages.
Si les différents twists de l’intrigue maintiennent le spectateur en haleine, les quelques moments intimistes qui dépeignent l’évolution des relations entre les protagonistes peinent à soutenir le rythme. Les personnages manquent d’épaisseur et sont stéréotypés. Le personnage de Callie est honteusement sous-développé (pour ne pas dire bâclé) et cantonné à un rôle, osons le dire, quelque peu misogyne. Callie ne se définit qu’à travers sa relation aux deux autres. On apprend juste furtivement qu’elle aussi, a des ambitions artistiques et tentent d’écrire pendant son temps libre. Elle incarne surtout une figure maternelle qui passe son temps à préparer à manger, faire les courses et poser dans une tenue légère pour les peintures de Finn. Le jeu des acteurs est par ailleurs assez inégal. Matt O’Leary, qui incarne Finn, est parfois peu convaincant, notamment dans les scènes où il feint la surprise (yeux écarquillés, bouche béante en mode je gobbe les mouches…). Quant à Callie, le personnage est trop superficiel pour laisser la place à Danielle Panabaker de réellement s’exprimer. Seul George Finn (Jasper) apparaît réellement convaincant dans sa métamorphose psychologique et sa paranoïa grandissante.
Le pari est donc à moitié réussi pour Bradley King, qui aurait gagné à apporter davantage de soin à la construction des personnages et à leurs relations. Time Lapse n’en demeure pas moins un film plaisant, sans grande originalité certes, mais qui a le mérite d’exploiter avec efficacité les ressorts narratifs offerts par la thématique du temps. La succession de twists, assez conventionnels, contentera le spectateur friand de rebondissements mais laissera sans grande émotion ceux déjà éprouvés par la multitude de films exploitant ces ficelles scénaristiques.
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Pays de production : États-Unis | Année de production : 2014
Réalisation : Bradley King
Scénario : Bradley King, B.P. Cooper | Photo : Jonathan Wenstrup
Musique : Andrew Kaiser | Production : B.P. Cooper
Interprètes : Danielle Panabaker, Matt O’Leary, George Finn
Vendeur : Devilworks