Synopsis
Un grand immeuble abandonné pourrait être un cadre idéal pour une soirée romantique. Le problème, c’est que là non plus, personne ne vous entend crier.
Critique
Nous débutons cette dernière journée du FEFFS avec un film espagnol, premier long métrage du réalisateur Rafa Martinez. Sweet home est un home invasion se situant dans un immeuble abandonné en plein coeur de Barcelone. Voilà un décor qui nous renvoie forcément au film Rec de Paco Plaza et Jaume Balagueró. Le choix de ce cadre est, selon le réalisateur, la résultante du manque de moyens du cinéma espagnol, mais a également été motivé par la facilité de tourner dans un décor unique. La comparaison avec Rec s’arrête là car Sweet Home opte pour une mise en scène des plus classiques et une histoire du même acabit… Bien trop classique dans le sens où le film repose sur des procédés éculés et lassants du cinéma d’horreur.
Sweet Home s’inspire du contexte économique difficile en Espagne, celui de la crise du logement. Une rapide présentation nous fait part des statistiques sur le nombre de personnes ayant été expulsés de chez eux, et pas toujours de manière très cordiale. On le sait, certaines agences n’hésitent pas à utiliser l’intimidation pour faire fuir les locataires de leur appartement. Ce procédé évidemment illégal et scandaleux, est un phénomène connu, que nous avons nous-mêmes traiter en France avec le superbe film de Jacques Audiard, De battre mon cœur s’est arrêté. Sweet Home s’inspire de cette pratique en la poussant à l’extrême. L’agence immobilière embauche des tueurs pour se débarrasser des locataires en faisant croire à des accidents. On assiste à quelques exemples lors des premières séquences où l’on voit un homme déposer des cafards sur une éponge de toilette de l’une des locataires de l’immeuble, espérant que celle-ci se tue en glissant sous la douche.
Le scénario de Sweet Home manque malheureusement de clarté et de crédibilité. Alicia est une jeune femme qui se rend dans un immeuble abandonné dans le cadre de son travail. L’immeuble est encore occupé par un dernier locataire, un vieil homme qui refuse de quitter les lieux malgré les insistances d’une agence immobilière. On ignore quel est exactement le travail d’Alicia, si celle-ci fait partie de l’agence, si elle est responsable des travaux, des normes de sécurité ou autre. Le fait est que celle-ci dispose des clefs de l’immeuble et décide d’en profiter pour organiser une soirée en amoureux et fêter l’anniversaire de son compagnon dépressif. L’idée d’une soirée romantique dans un immeuble abandonné est difficilement crédible. Nos deux tourtereaux vont rapidement se rendre compte qu’ils ne sont pas seuls et que des hommes cagoulés ont été engagés pour se débarrasser du vieil homme. Les sorties de l’immeuble ont été condamnées et Alicia et son compagnon vont devoir survivre face à leurs assaillants.
La seule originalité de Sweet Home réside dans le retournement de situation en milieu de film avec l’apparition d’un nettoyeur macabre. Lors de la première partie du film, on assiste à un home invasion plutôt ennuyant, où nos personnages tentent de se protéger face à une bande de malfrats pas très malins. Le réalisateur compare lui-même cette partie à une sorte de Maman j’ai raté l’avion, dans un registre évidemment beaucoup plus violent. Heureusement, la présence du nettoyeur, dont la première apparition se fait au volant d’un véhicule spécialisé dans l’extermination d’araignées, va apporter un nouveau souffle à cette histoire. Cette figure de l’exterminateur d’insectes renforce l’aspect immoral du marché immobilier, comparant les locataires à des insectes indésirables empêchant le bon fonctionnement d’une société capitaliste. L’homme en question est d’une brutalité extrême et représente enfin un danger concret et effrayant.
Seulement, malgré ce retournement de situation appréciable, ce nouveau personnage s’enfonce rapidement dans un archétype blasant du serial killer. On retrouve toutes les caractéristiques qu’on aime parodier dans les films d’horreur. Le méchant marche très lentement, savourant son emprise sur ses proies fragiles, et parvient à rattraper aisément la victime qui court à grandes enjambées. Il est méticuleux et mystérieux, a une force presque surhumaine et laisse traîner son arme contre le sol ou les murs pour faire peur. Bref, tant d’aspects qui ont certes fait le succès des slashers des années 80, mais qui paraissent totalement démodés de nos jours.
Sweet Home parvient tout même à nous offrir quelques bonnes séquences, en particulier celle de la fin où Alicia tente de fuir par les égouts. On constate une réelle amélioration d’un point de vue de la mise en scène qui jusque-là, se contentait d’être très académique. Même constat pour ce qui est du traitement des couleurs, marqué par une teinte très jaune en début de film, assez impersonnelle, pour déboucher sur une couleur beaucoup plus travaillée et intéressante lors d’une séquence finale vraiment très réussie.
Malgré de nombreux défauts, Sweet Home a le mérite de faire monter l’intérêt de manière crescendo. Rafa Martinez est un réalisateur qui semble prometteur et dont nous suivrons la carrière de prêt. On regrettera une structure beaucoup trop classique où l’on anticipe la plupart des événements, ainsi qu’un contexte social mal développé.
55
10
NOTE
Informations
Sweet Home
Titre original : Sweet Home
Réalisation : Rafael Martinez
Scénario : Rafael Martinez, Teresa de Rosendo, Angel Agudo
Casting : Ingrid Garcia Jonsson, Bruno Seville…
Pays d’origine : Espagne / Pologne
Genre : Survival
Durée : 80 minutes
Date de sortie : 27 juillet 2916 (VOD)