Synopsis
Un jeune couple adopte un petit garçon orphelin dont les rêves et cauchemars prennent vie chaque nuit, lorsqu’il dort.
Critique
L’enfance dans le cinéma horrifique a souvent été un vecteur efficace de la peur. L’instinct de parent, la fragilité des enfants, l’injustice de leur douleur, le cerveau humain arrive difficilement à ne pas se projeter dans ces histoires prenantes. Et de nombreux réalisateurs ont misé sur ce choix pour offrir de puissants et indélébiles récits. Mais une mouvance parallèle mise également sur l’enfant bourreau, la réincarnation du mal, le diable en personne. Ces petites têtes blondes ont prouvé depuis des décennies que l’âge n’est pas une composante primordiale quand il s’agit de semer la terreur autour de soi. Et derrière l’innocence peut se cacher le pire…
Mike Flanagan a choisi dans sa nouvelle production Before I Wake de se positionner entre ces deux catégories. Ou à cheval sur elles… La question étant : Va-t-il réussir à proposer dans cet hybride quelque chose qui suffise à se distinguer dans ce genre qui peine à renouveler l’offre ?
Dans sa construction, Before I Wake est une parfaite copie de ce que d’autres ont fait avant. Ces précurseurs ayant déjà bien préparé le terrain, Mike Flanagan semble risquer la disette. C’est vrai que des métrages comme Esther ou plus récemment Cas 39, même s’ils diffèrent un peu du film qui nous occupe aujourd’hui, ont offert de très bonnes prestations à une époque où l’on demandait de telles histoires. Et comme mon propos le précisait en introduction, ces films laissent souvent des traces indélébiles. Et effectivement, le schéma de l’enfant abandonné puis adopté par une famille qui très tôt regrettera son choix sent le réchauffé à plein nez. Du reste, il semble difficile de sortir de ce carcan pour construire quelque chose d’acceptable. Flanagan tentera donc de nous plonger très tôt dans les phénomènes étranges afin d’accrocher l’attention du spectateur et surtout de s’affranchir d’une rédhibitoire impression de déjà vu. Ce subterfuge, sans être salvateur, réussi tout de même à faire naître une certaine curiosité chez le spectateur. Mission à demi réussie. On découvre ainsi que le jeune Cody est doté d’étranges pouvoirs qui lui permettent de faire apparaître des choses, des objets, des personnes même, situées entre l’apparition et le rêve. Mais les bonnes choses en amenant de mauvaises, ces apparitions ne vont pas tarder à faire vivre l’enfer à la famille Hobson. La partie centrale du film restera la plus intéressante, créant une tension certes linéaire, mais ascendante et envoûtante. Mais lors des 10 dernières minutes, un nouveau problème se pose : où Flanagan veut-il en venir ? Là où Flanagan avait fait preuve de subtilité dans la construction de son remarquable Hush, il peine ici à faire preuve de réalisme. Il conserve en effet son climax dans une prison de verre, imperméable et inviolable. Assumé ? Peut-être. Habile ? Il semble que non. Car il n’est pas judicieux d’apporter la crème chantilly une fois la glace fondue, si bonne soit-elle. Quel dommage de n’avoir pas inséré plus insidieusement ce climax dans la seconde partie du film. Se contenter du mot Canquère pour tenir son récit à bout de bras est une hérésie. La fin du métrage, si intelligente soit-elle dans son contenu, laissera donc un goût amer à tous les spectateurs exigeant, quand d’autres se suffiront de la composante sentimentale des dernières minutes.
Mike Flanagan a tout de même pour lui d’appartenir à cette caste de nouveaux réalisateurs qui assure un spectacle visuel sobre, mais efficace, courant qui s’oppose aux travaux psychédéliques comme ceux de Nicolas Winding Refn par exemple qui, avec son The Neon Demon (que j’ai adoré du reste) ne misent pas sur le facilement bankable. Ici, on ne s’aventure pas dans les limbes de l’exotisme, mais on tente de maîtriser les artifices d’un récit d’épouvante qui n’abuse pas du racolage intempestif. Le premier point non négligeable concerne l’éclairage du film, et plus précisément celui des scènes clés : pas de pénombre pudique, pas de noirs artificiels, et donc pas de cache-misères. En cela, il s’oblige à être honnête face à l’œil qui le scrute. Ainsi, la valse des papillons est splendide de couleur et de grâce. Il en va de même pour le Canquère, que j’ai trouvé indéniablement efficace et oppressant dans ses attitudes. Et il n’est plus vraiment évident de tirer ce parti d’un film (Les Mama et autres ayant fait très fort à ce sujet). Ses victimes, même si le visuel m’a un peu trop amené dans l’univers de Nothing Left to Fear de Anthony Leonardi, sont également plutôt convaincantes. Et la dernière scène dans l’hospice est le point culminant du film, avec un concentré synthétique de tout le récit, mis habilement à l’écran et transformant les couloirs du bâtiment en un antre hanté par le mal qui semble suivre Cody depuis près de 90 minutes. Et c’est en cela que Flanagan réussit à tirer son Before I Wake vers le haut. L’honnêteté de son visuel parle en la faveur de la fébrilité de son récit, et l’ensemble s’extirpe donc du médiocre pour arriver au moyen (il ne faut pas oublier que ce film n’offre que peu d’originalité malgré tout).
Flanagan m’avait offert de bonnes surprises avec Oculus et Hush, et m’avait laissé penser à de belles réalisations à venir. L’essai n’est ici pas transformé et se situe en retrait par rapport au reste de sa filmographie. Mais il laisse tout de même transparaître des indices sur de futures pistes à creuser pour offrir du vrai grand spectacle horrifique. Et même si Before I Wake ne sera rien de plus qu’un checkpoint, je ne remettrai pas pour autant en question les qualités du réalisateur.
Informations
Before I Wake
Titre original : Before I Wake
Réalisation : Like Flanagan
Scénario : Mike Flanagan, Jeff Howard
Casting : Kate Bosworth, Thomas Jane, Jacob Tremblay…
Pays d’origine : Etats-Unis
Genre : Film de fantôme
Durée : 97 minutes
Date de sortie : 28 favril 2017 (Netflix)