Pays de production : Japon | Année de production : 2013
Réalisation : Kiyoshi Kurosawa
Scénario : Kiyoshi Kurosawa, Sachiko Tanaka | Photo : Akiko Ashizawa
Musique : Kei Haneoka | Production : Takashi Hirano
Interprètes : Takeru Satoh, Haruka Ayase, Miki Nakatani, Joe Odagiri
Distributeur : Version Originale
Synopsis :
« Une jeune mangaka est plongée dans le coma suite à une tentative de suicide. Son compagnon la rejoint dans son subconscient grâce à un programme expérimental développé par un neurologue. » (Synopsis PIFFF)
Critique :
Voici un film très attendu avec Real, sixième film en compétition du Paris International Fantastic Film Festival (PIFFF). Dès le début du festival, on nous a même distribué quelques pages d’un manga (Roomi) dessiné par notre personnage Atsumi et dont la signification prendrait tout son sens à la vision du film. Voilà qui attise notre curiosité.
Real est l’adaptation du roman de science-fiction The Day of the Perfect Plesiosaur de Rokurô Inui.
Kiyoshi Kurosawa est un réalisateur aujourd’hui considéré comme l’un des artistes marquants le renouveau du cinéma japonais. Après un début de carrière difficile où il sera sur la liste noire des producteurs, Kiyoshi Kurosawa s’impose en 1989 avec son film Sweet Home. Une entrée remarquée dans l’univers fantastique et horrifique dans lequel il signera ses plus beaux films, en particulier « Cure » qui marquera sa réputation en occident.
Inutile de se lancer dans une délicate description de l’histoire de Real. Une narration qui peut paraître complexe sur le papier, mais qui est d’une douce fluidité à l’image. Real est un film qui mérite d’être découvert l’esprit totalement vierge.
À travers cette jeune femme (Atsumi), dessinatrice de mangas, le film est une véritable réflexion sur la recherche et l’aboutissement artistique. Après une tentative de suicide, Atsumi tombe dans le coma. Un coma physique en parallèle à celui que l’artiste peut connaître, celui de l’enfermement spirituel dû à la passion artistique. Une passion qui dévore les esprits et qui les isole du monde extérieur, les laissant libre de l’interpréter à leur façon. Une souffrance perpétuelle, une recherche constante afin de trouver l’équilibre nécessaire entre sa perception du monde et l’acceptation de soi.
C’est toute cette thématique de l’artiste que nous expose Real. Une sorte de prison mentale indispensable à leur survie et où chaque remise en question peut inonder la pièce jusqu’à l’étouffement (cet appartement qui prend l’eau quand l’inspiration s’en va).
Real est un grand voyage dans le subconscient. À travers cette machine futuriste qui permet de s’immerger dans l’esprit de l’autre, il s’agit surtout de faire face à ce que crée notre imagination. C’est ainsi que Kiyoshi Kurosawa intègre les éléments horrifiques du film. Le manga, Roomi, étant une histoire de meurtres violents, vient se mélanger à la perception de la réalité de notre personnage. Une imagination qui parfois, peut apporter l’effet inverse et adoucir une dure réalité difficile à accepter. Ce voyage dans le subconscient est un travail sur soi et surtout une compréhension et une compassion envers l’être cher.
Car il s’agit aussi d’une histoire d’amour. Un amour d’autant plus fort qu’il est confronté à l’adversité mentale. Difficile de se faire une place dans un cœur comblé de passion artistique. Et dans la représentation du subconscient, cet amour est aussi une bataille physique où il faut sans cesse faire face à de nouveaux éléments destructeurs. Une bataille de longue haleine qui donne même l’impression que cette histoire ne trouvera jamais de réconfort. Real est un film de survie.
Il faut évidemment souligner cette réalisation soignée et minutieuse. Chez Kiyoshi Kurosawa, chaque plan a un sens et chaque mouvement de caméra est justifié. Là où certains s’élanceraient dans de longs et vertigineux mouvements de caméra pour nous surprendre, Kiyoshi Kurosawa se contente de précis plans fixes qui s’enchainent avec harmonie. De même qu’un travail de montage très épuré.
L’espace de 127 minutes, Real vous fera oublier votre quotidien et changera votre vision du monde en sortant de la salle.
Krueger
Note : 7/10